Pourquoi Gaston Mille se tourne vers le BtoC

L’entreprise basée à Courthézon propose désormais aussi aux particuliers de trouver chaussure de protection à leur pied via un site marchand. Une orientation qui viendra peut-être apporter une solution à des problématiques conjoncturelles mettant à mal l’activité des fabricants français.

Le spécialiste de la chaussure de protection a décidé de s'attaquer au BtoC et d'adresser son offre aux particuliers. Ainsi, parmi les quelques 160 références composant le catalogue de la PME, le cœur de gamme se trouve à présent en ligne... une réponse à un besoin récurrent exprimé par la clientèle, explique Nicolas Mille, actuel dirigeant de l'entreprise. "Deux raisons nous ont poussés dans ce sens. Tout d'abord, il y a les évolutions du marché, qui sont aujourd'hui préjudiciables pour les entreprises fabriquant en France. Car les distributeurs vont chercher désormais leur bonheur en Asie, il en résulte donc une importation massive... Ainsi, des partenaires de longue date se sont transformés au final, en concurrents. Nous avons enregistré une croissance faible sur le marché français".

Demande faite

Parallèlement, l'entreprise fait face depuis quelques années à une demande exponentielle de la part de particuliers. Leur objectif ? "Acquérir des modèles de chaussures de protection leur permettant de bricoler ou de jardiner chez eux en toute sécurité. Jusqu'ici, nous ne nous étions pas positionnés sur ce marché, qui était largement inexploité de façon générale, puis nous avons décidé de sauter le pas"... et de proposer à ces profanes chaussure à leur pied. "Nous sommes ravis de cette opportunité", lance par ailleurs Nicolas Mille, qui se félicite du succès du site, pour lequel il vise un chiffe d'affaires de 600 000 € à 700 000 € pour 2017.

Doubler l'activité à l'export

Gaston Mille compte actionner d'autres relais de croissance en ouvrant également un site marchand en anglais, pour les Etats-Unis. "Nous avons déjà mis en place un stock pour notre filiale de Chicago, adapté aux standards américains. Il ne nous reste qu'à ouvrir un compte bancaire, ce qui n'est pas forcément simple, dans la mesure où le gouvernement des Etats-Unis ne le permet pas de façon systématique lorsqu'il s'agit d'une entreprise étrangère sans grande antériorité sur son sol. Mais nous avons bon espoir de mettre en ligne le site d'ici fin 2017". Outre le BtoC, l'entreprise installée dans le Vaucluse s'appuie également sur cette filiale pour s'investir dans son marché historique, la fourniture de chaussures de protection auprès du monde de l'industrie : sociétés pétrolières, fabricants de tracteurs... A une échelle bien plus large que les seuls Etats-Unis d'ailleurs, puisqu'un partenariat a été établi avec un distributeur mexicain. Et des ventes, réalisées également au Panama, au Chili, en Argentine... "La croissance s'amorce outre Atlantique. Reste à présent à passer le cap de la rentabilité".

Même dynamisme en Asie, où l'entreprise a implanté deux usines de fabrication, et envisage de mettre également en place une filiale, sur le modèle de celle de Chicago. "Nous installons pour l'heure un VIE à Bombay, qui va commencer à vendre nos produits. Nous avons mis en place le stock... Et nous venons de remporter un très gros appel d'offres. Deux containers partiront aussi ce mois-ci direction l'Arabie Saoudite et la Malaisie..." D'où le caractère stratégique de cette implantation, puisque l'entreprise Gaston Mille gagne en compétitivité en livrant depuis l'Inde... "Nous réalisons actuellement 20 % de notre chiffre à l'export, l'objectif est d'atteindre 40 %".

"La France ne protège pas assez ses entreprises"

Miser sur l'export et le BtoC : c'est d'autant plus important lorsqu'on sait que l'entreprise, innovante par essence, a dû dernièrement faire face à une "véritable catastrophe", selon les termes du dirigeant. "Malgré un brevet validé pour notre surchaussure de sécurité destinée aux visiteurs, Millenium Full Protect, un distributeur a fait fabriquer en Asie un modèle équivalent au nôtre. Vendue forcément moins cher, de 4 à 5 euros... Nous l'avons attaqué en justice, mais comme il y avait 10 différences entre les deux surchaussures, les juges, qui viennent de rendre leur verdict, ont estimé qu'il ne s'agissait pas du même produit. Mon brevet est caduque... est tout un chacun peut à ce jour me copier", déplore Nicolas Mille, qui va faire appel de cette décision. L'incident est d'importance : cette surchaussure représente 2M€ de chiffre d'affaires sur les 12 réalisés annuellement par la PME, sa fabrication a nécessité de lourds investissements et mobilise une équipe de 10 salariés, sur un effectif total de 63. Et ils ne pourront à terme être gardés si le jugement en appel demeure inchangé. "Parce que je serai obligé, pour rester compétitif, de faire fabriquer ce produit à l'étranger... On nous serine l'importance de relocaliser la production, mais il faut que le reste suive. Pour m'implanter aux Etats-Unis, j'ai dû prouver que mon brevet ne portait pas sur un produit déjà existant sur leur sol... Pourquoi ne fait-on pas la même chose dans notre pays ? La France ne protège pas assez ses entreprises innovantes. C'est pour cela que ces dernières ne déposent pas plus de brevets", conclut Nicolas Mille.

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