Comment Brasserie Carteron développe son goût de l'innovation

En utilisant le savoir-faire vigneron et en inventant une bière rosée, la brasserie installée à Hyères réussit à se démarquer de la concurrence, très développée. Et poursuit néanmoins la recherche en terme de recettes et de méthodes de production.

Si elle a été primée aux derniers Worldbeer Awards, c'est justement parce qu'elle ne fait pas comme tout le monde. La brasserie Carteron, ouverte en 2011 à Saint Tropez et sise aujourd'hui à Hyères, a initié son activité avec une petite originalité : elle a su mettre à profit le passé professionnel de ses fondateurs et sait ce que transfert de compétences veut dire. "Nous étions vignerons depuis 10 ans quand nous avons décidé de produire aussi de la bière, par souci de diversification de nos activités", explique Thomas Carteron.

L'effet rosé

Il a donc adopté l'art brassicole avec Mathilde, son épouse et met en avant "le savoir-faire, le travail des matières premières, de fermentation et de mise en bouteille" qui était déjà le leur du fait de ce passé au cœur des vignes. Mais outre la précision du geste, cet atout fait figure d'essai plus que transformé dès lors qu'il s'agit de concevoir des produits se démarquant de la concurrence. Et elle est conséquente : "l'ouverture d'une micro-brasserie est accessible de nos jours avec peu d'investissements. D'où l'émergence de nombreux acteurs dans le secteur... Dans le Var, nous sommes 14. Et plus de 1 000 à l'échelle nationale". Il y aurait quelque 120 adhérents en Paca au SNBI, syndicat national des brasseurs indépendants. Alors, comment tirer son épingle du jeu ? Les Carteron l'ont fait notamment en concevant un produit original. "Nous ne voulions pas entrer sur le marché de manière classique, en concevant notre blonde, notre blanche, notre ambrée. Nous avons donc donné le jour à une bière rosée, en jouant la carte de l'ancrage provençal". Le secret de fabrication ? Troquer le sucre de betterave contre le moult concentré de raisin rectifié, additionnés de tannins, qui confère à la boisson des arômes s'approchant du Syrah, donc sur le fruit rouge, notamment le cassis.

Mettre l'accélérateur sur l'export

Mais le monde du vin a aussi inspiré d'autres idées à Mathilde et Thomas Carteron. "Nous nous sommes amusés à faire des assemblages de malts, un peu comme on fait en viticulture des assemblages de cépages. Ce qui donne des bières plus délicates en bouche, plus complexes également. Il faut savoir qu'il existe plusieurs malts, mais on peut aussi jouer avec les houblons, puisqu'il en existe près de 250, viennent ensuite les levures... Bref, autant d'ingrédients que l'on peut sélectionner et combiner à l'infini pour créer autant de nouvelles recettes. C'est en droite ligne avec cette démarche que l'on a conçu notre bière de Noël, inspiré des 13 desserts et retraduisant toute la complexité de ce parcours aromatique, en utilisant des maltes aux notes biscuitées, chocolatées..." La brasserie propose ainsi deux gammes, la Trop et la Pure - cette dernière issue de malt bio pour laquelle la brasserie se trouve en cours d'accréditation - et compte poursuivre la déclinaison des bières de saison en 2018. Outre celle de Noël, une deuxième a déjà été élaborée pour Halloween. Trois autres moutures devraient voir le jour l'année prochaine, en optimisant ce désir de jouer avec les produits locaux, par exemple la figue de Solliès ou la châtaigne de Collobrières... Une carte provençale qui fait mouche à l'étranger, puisque les bières Carteron s'exportent déjà pour 10 % de leur activité, en Côte d'Ivoire, au Liban, au Québec, aux Etats-Unis, en Belgique et en Espagne. Un axe de développement qui devrait être plus largement investi en 2018, puisque les pays de Scandinavie et d'autres provinces du Québec sont dans le viseur des brasseurs.

Plus grande échelle

Mais outre l'originalité des recettes, Mathilde et Thomas Carteron ont su aussi induire l'innovation dans leurs méthodes de production. Ils ont par exemple accepté un procédé breveté de filtrage de l'eau (par l'entreprise aixoise Cryo) lui permettant de ne pas dénaturer son PH et de la désodoriser. Bref, autant de prises de position qui vont lui permettre de dépasser cette année une production de 800 hectolitres, tout en persévérant dans la viticulture avec une production de 1 000 hectolitres. "L'an dernier, nous étions à 2/3 de vin et 1/3 de bière, donc cette dernière est en train de prendre le pas". Les deux gammes sont distribuées en GMS, chez les cavistes et dans le secteur CHR. "Sur le plan géographique, nous sommes plus en force dans notre département, mais nous avons pour objectif d'être davantage présent à l'échelle de la France. Nous sommes partenaires avec un grossiste qui s'occupe de nous au national". Une marge de manœuvre pour les brasseurs, qui vont avoisiner cette année un chiffre d'affaires d'un million d'euros et prévoient de le dépasser l'année prochaine.

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