ITER a désormais son siège en attendant son réacteur

Le siège d?ITER, le projet de réacteur thermonucléaire expérimental international, a été inauguré jeudi 17 janvier à Saint-Paul-lez-Durance (Bouches-du-Rhône). L?outil incarne la plus grande coopération scientifique internationale dans le domaine de la recherche nucléaire.


Sur fond de polémique liée aux dépassements budgétaires, de contestation à propos de la pertinence scientifique du projet, ITER, le projet de réacteur thermonucléaire expérimental international, qui accuse également du retard (il devrait être opérationnel en 2010), dispose désormais de ses bâtiments administratifs dessinés par l'architecte régional Rudy Ricciotti, auteur du célèbre MuCem à Marseille. Amorcés en septembre 2010, les travaux de construction (coût de 40 M€ T.T.C) avaient été confiés au groupement d'entreprises Léon Grosse/Axima.

Le siège (20 500 m2 sur 6 niveaux), doté d'une capacité d'accueil de 500 personnes, a été inauguré en présence d'Osamu Motojima, directeur de l'organisation internationale ITER, Geneviève Fioraso, ministre française de la Recherche et Gunther Oettinger, commissaire européen à l'énergie mais sans la présence des autres partenaires pour un outil censé incarner "la plus grande coopération scientifique internationale dans le nucléaire" en associant la Chine, l'UE, les États-Unis, l'Inde, le Japon, la Corée du Sud et la Russie.
Pour mémoire, International Thermonuclear Experimental Reactor doit tester à horizon 2050 la faisabilité scientifique et technique de la fusion nucléaire comme nouvelle source d'énergie (qui reviendrait à maîtriser l'énergie du soleil, schématise-t-on). Une énergie qui serait inépuisable et peu polluante.

"Nous bénéficions d'une quarantaine d'années d'expériences scientifiques menées simultanément à travers le monde sur la fusion, relève Geneviève Fioraso, ministre de la Recherche. Il était urgent de mettre à profit l'expertise acquise. Ce projet est à la fois un défi sur le plan technologique, une opportunité sur le volet industriel, un levier pour l'économie et pour notre compétitivité, et une chance formidable pour les scientifiques du monde entier à travailler ensemble sur du long terme. Nous pouvons raisonnablement espérer des ruptures technologiques majeures".


Dérapages incontrôlés des coûts

C'est en 2003 que le centre de recherche et développement dans l'énergie nucléaire de Cadarache, à Saint-Paul-lez-Durance, a été préféré à Vandallos (Catalogne) pour être le site européen candidat à l'accueil du projet. Et c'est en 2005 qu'il l'a emporté au niveau mondial face à Rokkasho-Mura au Japon.

Le coût du programme, réparti entre les 7 partenaires était initialement estimé à 12,8 Mds € pour les 10 années de la phase de construction de la machine et à 5,3 Mds € pour l'exploitation sur 20 ans. Pas encore sorti de terre, il est déjà de 14,6 Mds €.
La facture pour l'Europe, qui est à ce jour la seule à participer directement (en euros !) au financement et à hauteur de son engagement initial de 45%, est passé de 2,7 à 6,6 milliards d'euros (dont 650 M€ débloqués encore il y a quelques semaines pour assurer le financement jusqu'à fin 2013). Dans ce concert des nations, les autres membres contribuent à hauteur de 9% mais en fournissant des prestations en nature : éléments de la machine fabriqués sur son propre territoire. La France occupe toutefois une place particulière avec son implication à hauteur de 1,168 milliards, dont 467 M€ assurés par 8 collectivités territoriales de la région Paca notamment pour les aménagements routiers et équipements régionaux comme la construction d'une école publique internationale à Manosque.
Naturellement, le triplement de la facture initiale suscite des grincements à Bruxelles. Pour sa part, la ministre de la recherche a aujourd'hui annoncé que "dès son arrivée au Ministère, elle avait fait passer la contribution annuelle de la France de 62 à 100 M€/an pour les trois années à venir".

"Projet scientifique non validé"
En tout cas, aux abords de l'enceinte, les élus régionaux Europe Ecologie/Les Verts/Partit Occitan étaient là pour rappeler leur opposition à un "programme de recherche non validé scientifiquement et qu'aucun scientifique reconnu dans le domaine de la physique nucléaire n'a souhaité soutenir". À l'instar des 3 prix Nobel de physique (Pierre-Gilles de Gennes, Georges Charpak, Masatoshi Koshiba).
Et dans une tribune parue dans Médiapart, Michèle Rivasi, députée européenne EELV, Jean-Pierre Petit, physicien et ancien directeur de recherche au CNRS, Christian Desplats, conseiller régional Paca, dénoncent "un fiasco scientifique et financier programmé".
Une interpellation à laquelle la Ministre de la Recherche a répondu en rappelant que "la diversité des points de vue peut s'exprimer au sein de la majorité gouvernementale" mais, où la solidarité doit primer.

Adeline Descamps


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