Kevin polizzi, président de Jaguar Network

Hébergeur informatique et opérateur télécoms, Jaguar Network capitalise sur son positionnement à la croisée des deux secteurs. Depuis 2006, la société marseillaise enregistre des croissances à deux chiffres. Le 28 novembre, elle inaugurera à Marseille un DataCenter de 8 000 m2. Titulaire d?un BTS informatique, Kevin Polizzi a cofondé avec son frère son entreprise, à peine sorti de l?école. Il était l?invité ce midi du Centre des Dirigeants.

Jaguar Network a terminé son exercice 2012 sur un chiffre d'affaires de 12,8 M€ en croissance de 49 % sur un an avec une rentabilité nette de 1,54 M€. Vous êtes portés par le cloud ?

Kévin Polizzi : J'ai fondé avec mon frère Jaguar Network en septembre 2001, et nous enregistrons une croissance à deux chiffres depuis 2006. Cette année, nous devrions finir l'exercice sur un C.A de 17 M€ (50 emplois dont 35 ingénieurs, ndlr). Cette politique de croissance est le résultat des gros investissements que nous avons réalisés ces dernières années et tout en autofinancement. Jaguar Network est à la fois un hébergeur informatique et un opérateur de télécommunications. On a passé 12 ans à bâtir un réseau de fibres optiques à très haut débit pour s'affranchir des opérateurs tiers et offrir aux entreprises l'accès aux technologies de nouvelle génération (datacenter, réseau IP, services managés). Grâce à ce réseau autonome interconnecté avec des points d'échanges installés dans une trentaine de data centers dans le monde, situés près des grands sites de télécommunications, on est en mesure de proposer un routage de qualité quelle que soit la destination à joindre et une qualité de service quels que soient les problèmes de trafic. On garantit une disponibilité de 99,99 %. On a parallèlement développé des solutions d'hébergement qui permettent aujourd'hui de couvrir la quasi-totalité des besoins de stockage de données, y compris les plus critiques, sur serveurs mutualisés, serveurs dédiés ou en mode cloud. Ce qui nous a permis de nous distinguer de la concurrence et de ses produits packagés. On n'a pas de produits sur étagères, on élabore des solutions correspondant aux problématiques des clients et adaptés à leurs métiers. Un DataCenter n'est pas qu'un ensemble d'équipements entre des murs sécurisés et climatisés. Les clients ont besoin d'être accompagnés dans leur démarche d'externalisation de données.


Est-ce à dire que les entreprises ont intégré la nécessité de gestion et conservation de leurs données ?

K.P. : On a commencé par travailler avec les pure players (Voyage privé, Digitick, beauteprivee, rue du commerce, pure shopping, wizi-shop ..., ndlr) entreprises du e-commerce qui, en externalisant leurs ressources informatiques chez nous, attendent des infrastructures de très haute disponibilité pour faire face à une montée de charge dans le cadre de leurs opérations (ventes privées, soldes...).Cette exigence couplée à la difficulté à recruter du personnel qualifié nous ont permis d'acquérir toujours plus de compétences, d'éprouver de nouvelles méthodes de travail que nous avons industrialisées si bien que l'on est capable aujourd'hui de faire face à des demandes en termes aussi bien de capacité d'accès (nombre de visiteurs), que de stockage de données sensibles (cartes bancaires, données personnelles, passerelles de paiement). Aujourd'hui, nous avons un large panel de clients privés et publics : 700 clients dans les domaines de l'informatique et des télécommmunications (Altran, Avenir Télécom, Capgemini...), du commerce (Galeries Lafayette, BHV, Fnac...), des médias (Dailymotion, linkedIn...), du transport et tourisme (Autogrill, Sncf, Escota, RTM...), de l'industrie (Veolia, Dassault Systems, zodiac...). Mais aussi des collectivités locales.
L'externalisation a été crescendo : d'abord les applications critiques, les équipements, puis tout ou partie de leur gestion. Aujourd'hui, elles sont dans une dynamique d'achat à la demande d'applications ou infrastructures infogérées. Avec l'avènement du cloud, elles ont pris conscience du coût que pouvait générer la perte de données. Et ont réalisé qu'elles doivent y accorder la même vigilance qu'à l'état de leur trésorerie.


Vous dites qu'une entreprise gagne de l'argent en externalisant ses données.

K.P. : Grâce au cloud computing, il n'est plus besoin d'investir massivement puisque les moyens sont consommés à la demande. Nos clients affectent donc librement leur budget informatique en fonction de leur charge d'activité, de leurs besoins, de leur croissance... Et nos offres ont été conçues pour cela. Beaucoup de TPE et de PME n'ont pas de service informatique. 80 % du marché reste à faire.


Vous allez inaugurer dans quelques semaines un nouveau DataCenter de 8 000 m2 dans le 16e arrondissement de Marseille dans lequel vous avez investi 12 M€.

K.P. : Il y a encore beaucoup de pédagogie à faire sur ces métiers qui restent obscurs et du coup qui ne permettent pas à une entreprise ou à une collectivité d'appréhender tout ce qu'il est possible de faire avec cet outil, qui prend la forme d'un bâtiment capable de loger 250 000 serveurs et d'une capacité de 15 Mw en adduction électrique. On a investi 12 M€ pour faire de ce site, classé en "Tiers 4" (les DataCenter sont classés en fonction de leurs caractéristiques : le tiers 4 offre un taux de disponibilité de 99,995 %, ndlr) un équipement de haute sécurité et disponibilité. Opérationnel depuis 2012, il a d'abord rencontré son marché auprès des acteurs Internet mais depuis, d'autres entreprises les ont rejoints  (Générale de Santé, Sage, L'oréal, Daher, Neopost, Radisson...) et aujourd'hui le site fonctionne à 25 % de sa capacité.


Vous annoncez des recrutements.

K.P. : On a 13 postes ouverts actuellement, basés à Marseille, Paris et Nice. On peine à recruter parce qu'il n'est pas évident de trouver des profils qualifiés en fonction de nos métiers mais aussi en raison d'un problème d'attractivité du territoire. Toutefois, si la moyenne d'âge était de 25/26 ans en 2007, aujourd'hui elle est autour de 35 ans avec l'arrivée de cadres qui avaient déjà vécu une première vie dans les télécoms.


Demain, la croissance passera par ...
K.P. : De la croissance organique mais aussi externe. Nous avons quasiment atteint la taille critique. La difficulté est de trouver une société qui soit dans notre ADN.


Vous ne craignez pas la concurrence en tout cas ?
K.P. : On a plein de concurrents, qui sont des constructeurs ou intégrateurs. On a mis 10 ans à avoir la bonne taille et à industrialiser nos process. Les barrières à l'entrée sont à la fois techniques et financières. Je vois mal comment après avoir vendu 10 ans du matériel, nos concurrents puissent nous challenger sérieusement.

Propos recueillis par Adeline Descamps


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