Sortir du nucléaire, une condition non négociable

25 ans après Tchernobyl, quelques semaines après le terrible accident de Fukushima, le débat sur la question du nucléaire ne suscite pas beaucoup d?intérêts. Triste constat éprouvé la semaine dernière par les élus verts de la Région.


"Comment se fait-il qu'après deux accidents nucléaires aussi graves et 40 ans de militantisme pour dire que nous n'étions pas d'accord avec le nucléaire, nous n'ayons pas réussi à convaincre ? N'a-t-on pas péché quelque part ? N'a-t-on pas suffisamment étoffé notre discours pour montrer que nous avions un plan B et qu'il existe d'autres solutions ? Peut-être aurait-il fallu une argumentation plus technique pour que l'on n'en soit pas là ?", interroge Jean Naya, adjoint au maire d'Allauch et membre d'Europe Ecologie. La question est d'à propos. Organisé jeudi dernier dans le cadre des Etats généraux de la Région sur la démocratie, le débat public sur la question du nucléaire auquel était convié tout citoyen a à peine réuni une vingtaine de personnes, pour la plupart membres d'Europe Ecologie Les Verts.

Pourtant, est-il précisé, Paca est plus que jamais concernée avec le centre expérimental de Cadarache, ses 21 installations nucléaires de base et 50 installations classées, le projet ITER, le nucléaire militaire de Toulon (où avait eu lieu la veille un débat similaire) ainsi que la centrale de Tricastin en frontière.

Force est de constater en effet que Fukushima, où les 1000 employés de l'entreprise Tepco et de ses sous-traitants présents à la centrale continuent d'être exposés à des niveaux de radiation supérieurs au seuil légal (deux ont déjà été exposés à 200 msv (millisieverts) et une trentaine à plus de 100 msv) a quasiment disparu des colonnes des journaux. Tout comme le blocage début mai des accès au chantier de l'EPR de Flamanville par les militants de Greenpeace est passé inaperçu.

Pour les anti-nucléaires, pour qui le nucléaire sûr n'existe pas, la tenue d'un discours plus technique sur la question ne changerait rien : "L'obstacle est d'ordre politique. En face de nous, nous avons des puissances économiques colossales qui sont privatisées. L'industrie du nucléaire est un instrument du pouvoir".

Délibérément provocatrice, Michèle Rivasi, fondatrice de la CRIIAD et députée européenne EELV, demande qu'en guise de retour sur expérience, l'on dresse une liste des "noms des liquidateurs en cas d'accident". D'autres l'ont été davantage. Alain de Halleux, réalisateur du documentaire "Tchernobyl Forever", n'a-t-il pas déclaré : "Le nucléaire, je suis pour à condition qu'Henri Proglio, P.d-g d'EDF s'engage à prendre la pelle et le seau si ça pète".

Pour le mouvement écologique, la sortie du nucléaire n'est donc pas négociable - pour qu'un accident ne se produise pas, pas d'autres solutions que d'en sortir - et la France, pays le plus nucléarisé au monde, possède une responsabilité planétaire en la matière. Reste à toucher le grand public et à être crédible sur les alternatives. D'autant plus que les arguments des partisans de l'atome opposent systématiquement l'argument (de poids) de l'emploi. Bref, reste à imaginer un scénario de sortie qui produirait plus d'emplois qu'il n'en détruirait. C'est tout l'enjeu du collectif Négawatt, institut de recherche et de formation, pour lequel il existe non pas une solution unique et centralisée mais plusieurs modes de production d'énergie tout à fait crédibles. "Les énergies renouvelables produisent deux fois plus d'emplois. Le photovoltaïque et les éoliennes font travailler beaucoup plus les PME dont on sait que ce sont elles qui produisent le plus d'emplois....".

À quelques mois de l'échéance reine de la vie politique française, le mouvement écologique espère bien trouver les alliances politiques nécessaires pour faire passer le débat dans une autre ère. Et sur cet aspect également, rien ne sera négociable. Que les alliés d'un éventuel programme commun se le tiennent pour dit.

Adeline Descamps

Photo : Une maquette du projet ITER

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