Jean-Luc Monteil – Medef PACA : "L’égalité des chances n’est pas une ambition cosmétique"

Parrain de l'opération Sésame Jeunes Talents pilotée par l'Apec et qui vise à accompagner les diplômés issus des quartiers prioritaires de la ville, le patron des patrons régionaux en profite pour en remettre une couche sur ce qu'il reste encore à faire en matière de diversité.

La Tribune - On semble assister à une "démocratisation" de l'entreprenariat notamment avec l'émergence des start-ups. Une façon de contribuer à l'égalité des chances face à la création d'entreprises ?

Jean-Luc Monteil : D'une manière générale, on observe depuis plusieurs années que les Français ont de plus en plus le goût de l'entrepreneuriat. Un récent sondage de l'IFOP révèle d'ailleurs que 60 % d'entre eux jugent les entreprises plus utiles que l'État ! Concernant les enjeux d'égalité des chances, sans tomber dans l'essentialisme, il est vrai par exemple que les jeunes de banlieue sont particulièrement désireux de créer leur propre entreprise. Pour preuve, le département de Seine-Saint-Denis, l'un des plus pauvres de France, est parallèlement l'un des plus dynamiques en matière de création d'entreprises. En tant qu'entrepreneur et qui plus est président régional de la première organisation patronale tricolore, je ne peux que m'en réjouir. Pour aller plus loin, on ne peut pas tout attendre des pouvoirs publics. Malgré les contingences de son quotidien et de sa condition individuelle, chacun doit être entrepreneur de sa vie ! En France, la réussite est possible à condition de s'en donner les moyens, et ce que vous veniez de quartiers populaires comme de zones rurales. L'"impossible" ne fait pas partie du vocabulaire des chefs d'entreprise.

L'ouverture de certaines grandes écoles à des jeunes diplômés issus des quartiers sensibles est-elle une vraie avancée ?

Oui et trois fois oui ! À rebours de certaines idées reçues, les grandes écoles françaises se mobilisent depuis de nombreuses années pour favoriser l'insertion des jeunes issus des quartiers sensibles. De "Ambition Campus" de Sciences Po Paris en passant par "Une grande école : pourquoi pas moi ?" de l'ESSEC notamment, elles n'ont de cesse de créer des passerelles entre des mondes trop souvent cloisonnés. Néanmoins, malgré ces avancées, la configuration des concours ainsi que le coût des scolarités demeurent des barrières importantes à l'entrée pour ces jeunes. Une véritable révolution doit s'opérer en la matière !

Quel est l'impact de dispositifs tels le Sésame ?

L'opération "Sésame jeunes talents" mise en place par l'Apec est un dispositif formidable. Il permet ainsi de rapprocher des jeunes aux CV parfois très riches mais issus des quartiers populaires de cadres de notre territoire des secteurs privé ou public qui peuvent les conseiller dans leur orientation professionnelle et leur ouvrir leurs réseaux. D'une manière plus globale, il permet de rapprocher des mondes qui se côtoient au quotidien sans véritablement se connaître. La France ne peut pas se priver des talents issus de ses quartiers populaires. Comme disait Montaigne, "le monde n'est que variété et dissemblance". La France aussi, alors agissons ensemble !

Que resterait-il à mettre en place ?

Beaucoup reste encore à faire, même si beaucoup a déjà été fait ! Les dispositifs pour favoriser l'égalité des chances sont légion ; qu'ils émanent de l'État, des écoles de commerce ou d'associations... En la matière, le MEDEF est proactif depuis de nombreuses années. Pour preuve, nous avons créé en 2011 un "Comité Diversité" dont l'objectif principal est de convaincre tous les chefs d'entreprise que la diversité des talents (des identités, des opinions et des parcours) concoure à la croissance française ainsi que, plus globalement, à la cohésion nationale. Car l'égalité des chances, rappelons-le, c'est aussi bien entendu l'égalité femme/homme, l'insertion professionnelle des personnes handicapées, des personnes très peu qualifiées...

Néanmoins, comme je le disais précédemment, il faut engager impérativement une véritable révolution en la matière ! Les taux de chômage qu'enregistrent nos quartiers populaires et nos zones rurales, le manque de diversité avec un grand D dans les rangs de l'ENA, sur les bancs de l'Assemblée nationale ou dans les exécutifs des grandes entreprises sont des enjeux majeurs pour notre avenir à tous. L'égalité des chances n'est pas une ambition cosmétique ; c'est un défi vital pour notre société !

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