Laurence Vanin : "Les techno-sciences doivent être placées au service de l'homme"

Partenaire des Rencontres économiques d'Aix-en-Provence qui se déroulent du 6 au 8 juillet prochain, La Tribune publie chaque semaine un entretien avec un acteur économique originaire de Provence Alpes Côte d'Azur. Ou il est question des "Métamorphoses du monde", thème de l'édition 2018. Entretien avec la philosophe, directrice de la chaire Smart City et Philosophie que déploie l'Université Côte d'Azur, portée financièrement par les industriels.
(Crédits : DR)

La Tribune - Les Rencontres économiques d'Aix-en-Provence évoquent un monde de "Métamorphoses". Que vous inspire le terme ?

Laurence Vanin - La métamorphose, c'est le moment de tous les changements, d'un nécessaire retour à soi. La métamorphose ce n'est pas une modification. C'est revenir à une innocence première. Qui, lorsque nous l'avons retrouvée, permet de reconstruire son moi profond. La métamorphose peut nous mettre sur une voie qui nous correspond mieux. La rupture amène forcément à faire d'autres choix. Il peut aussi être question de métamorphose au sens collectif. Et dans ce cas, la vie collective ne peut pas se construire avec l'ego. Il faut cependant garder sa singularité. Le collectif, c'est la combinatoire des singularités. Ces deux métamorphoses faites, c'est là qu'intervient la smart city, qui peut être le lieu de tous les fantasmes avec le risque de l'exacerbé. Il faut construire la ville de demain en envisageant la jonction entre les habitudes de chacun, pour en faire un lieu où l'on est respectueux de la place de l'autre. Les technosciences ne peuvent pas tout résoudre. Elles doivent être placées au service de l'homme et non pas l'inverse.

Faut-il craindre l'impact de l'intelligence artificielle ?

L'intelligence artificielle va faciliter la vie, les nanotechnologies vont permettre des états des lieux concernant la santé par exemple. Il ne fait pas refouler le progrès. Les GAFAMA ont déjà construit une modélisation. Or, nous pourrions peut-être proposer un modèle qui serait le contraire des GAFAMA. L'Europe est une zone d'opacité, ces géants n'y sont pas implantés comme ils l'imaginaient.

L'Europe, justement, peut-elle devenir un géant du numérique ?

Oui. L'Europe n'a peut-être pas été convaincante politiquement. L'Europe est fragile mais peut-être a-t-elle une carte à jouer dans la fabrique d'un nouveau modèle numérique, un modèle où chacun pourra se projeter. L'Europe peut entraîner avec elle le bloc africain. Ici, nous avons des chercheurs, des cerveaux, notre Chaire est positionnée sur l'axe euro-méditerranéen. Si nous arrivons à jouer la carte d'un ralliement avec l'Afrique, nous sommes capables de créer un pôle concurrent de la Silicon Valley et des GAFAMA.

L'éthique est-elle indispensable ou est-elle un frein ?

L'éthique est indispensable. Les interrogations sont apparues lorsque Dolly (le premier mammifère, une brebis, cloné NDLR) est née. Il y a un ensemble de valeurs qui nous devons poser à l'horizon de la smart city. Il faut dire ce que l'on veut. Veut-on préserver les libertés, rester des êtres indépendants ? Il faut poser l'horizon des valeurs, et les valeurs en question ne sont pas moralisatrices. L'éthique intervient là où se pose la question du citoyen connecté. C'est comment devenir un smart citoyen épanoui.

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