Conjoncture : dans les Alpes-Maritimes, le doute s’instaure

Si l’activité des entreprises azuréennes s’est maintenue en 2018, la contraction observée en fin d’année préfigure toutefois un exercice 2019 plus mitigé qui affecte le moral des dirigeants. Contexte international incertain, mouvements sociaux à rallonge, image de la France dégradée, marges en berne… l’inquiétude semble de mise.
(Crédits : Dado Ruvic)

Sur le papier, rien de grave. Après une très belle année 2017, rien de surprenant à ce que l'activité des entreprises azuréennes marque le coup en 2018. "Un ralentissement ne veut pas dire retournement", insiste d'ailleurs Didier Collet, le directeur départemental de la Banque de France, lors du dernier point conjoncture organisé par la CCI Nice Côte d'Azur dont l'Observatoire Sirius ausculte, chaque trimestre, la santé du corps économique des Alpes-Maritimes. Lequel s'essouffle donc mais reste encore vaillant avec un chiffre d'affaires 2018 global en hausse de 1% et un emploi qui se maintient.

Dans le détail, on constate un secteur industriel qui poursuit son ascension (+1%), une construction qui s'accorde une petite pause (-0,5%), des commerces (+1%) portés par les activités de l'équipement de la maison (+4%) et du gros alimentaire (+1,5%) et des services au mieux de leur forme (+4%) si l'on excepte le segment cafés, hôtels, restaurants (CHR). Celui-ci finit l'année 2018 au même niveau que 2017, après un net recul (-2%) de l'activité au quatrième trimestre que les professionnels touristiques expliquent par le mouvement des gilets jaunes et l'image d'une France à l'international dégradée. De quoi peser sur le moral. Quel que soit le secteur étudié.

Moral en berne

"Les chefs d'entreprise dans leur ensemble ont une appréciation de l'activité qui se détériore depuis le deuxième trimestre 2018. Leur moral est proche de celui observé fin 2016, après l'attentat de Nice, et les perspectives d'activité ne sont pas mieux orientées pour le premier semestre 2019", note, dans son compte rendu, la CCI. Et quand le moral n'est pas au beau fixe, ce n'est jamais bon signe. "Un chef d'entreprise pessimiste dans ses prévisions, c'est un chef d'entreprise qui freinera son investissement et qui ne fera pas les efforts nécessaires pour aller au-delà en termes de croissance", analyse Jean-Pierre Savarino, président de la chambre consulaire. Pour qui "les perspectives 2019 s'avèrent mitigées".

Il y a, à cet égard, des signes qui ne trompent pas. Les soldes d'hiver, d'abord, qualifiées de "mauvais cru". Selon l'enquête de la CCI NCA consacrée à ce sujet, 56% des commerçants en centre-ville interrogés se déclarent insatisfaits, 63% si l'on se concentre sur les acteurs de l'équipement de la personne. Baisse de la fréquentation, multiplication des périodes de remise, hausse de l'e-commerce (+13,4% sur l'année 2018) favorisée par une accessibilité des commerces contrainte par les manifestations, report des achats observé dû à l'incertitude des consommateurs quant aux effets du prélèvement à la source... Les raisons sont plurielles. Et la situation préoccupante, notamment "pour toutes ces petites entreprises qui n'ont pas pu engranger suffisamment de recettes pendant les fêtes pour tenir jusqu'à l'été", alerte Jean-Pierre Savarino. Ainsi, si le commerce du gros alimentaire envisage une hausse de son chiffre d'affaires en 2019, les autres branches du secteur se montrent prudentes voire, pour le retail, pessimistes.

L'export se contracte, l'emploi stagne

De même, les chefs d'entreprises mettent en avant des indicateurs financiers qui se dégradent, avec "des marges moins importantes, des trésoreries en baisse et des investissements souvent reportés". Et ce, dans un contexte international incertain où l'encore inconnu effet Brexit côtoie la guerre commerciale sino-américaine et la mise en place de "stratégies non coopératives", dixit Didier Collet, à l'intérieur même de l'Europe. Conséquence : une activité à l'export qui se contracte (-0,5% en 2018), surtout dans le domaine industriel. Lequel anticipe toutefois un niveau d'activité stable en 2019 quand les services aux entreprises et de transport, d'une part, la construction, de l'autre, veulent entrevoir une amélioration.

La construction est par ailleurs le seul secteur à prévoir une reprise de l'emploi en 2019. Le commerce et les services, alors qu'ils avaient étoffé en 2018 leurs effectifs de 1% pour le premier, de 2% pour les seconds, envisagent de les stabiliser en l'état. L'industrie, elle, s'inscrit sur une légère baisse, comme lors de l'exercice précédent (-0,5%). "On a là un paradoxe", relève Jean-Pierre Savarino. "La croissance des activités en 2018 n'a pas profité à l'emploi permanent. Cela peut être un signe de rentabilité insuffisante, c'est surtout le signe d'un manque de main-d'œuvre correspondant aux besoins des entreprises". Et ce, dans un département où le taux de chômage structurel est de 9,7%, soit 0,6 point au-dessus de la moyenne nationale. "Il y a des entreprises qui ne pourvoient qu'entre 10 et 15% de leurs besoins de recrutement", affirme le président de la chambre consulaire qui voit en l'apprentissage et son futur campus dédié une des portes de sortie de crise. A cet égard, 13% des entreprises azuréennes envisagent l'embauche d'un apprenti en 2019. C'est 3 points de plus qu'en 2017.

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