Philippe Veran : "La filière dentaire est une profession oubliée"

Créateur de valeur et d'un chiffre d'affaires de 11 milliards d'euros, l'art dentaire est, depuis le mois de mars, totalement à l'arrêt. Ce qui n'est pas sans mettre en danger l'ensemble de la chaîne de valeur. Et alors que le déconfinement pointe le bout de son nez, le PDG du spécialiste de l'implant dentaire Biotech Dental, originaire de Salon-de-Provence, propose un guide de bonnes pratiques, où il est question d'innovations et de solutions adaptées. Histoire de ne pas continuer à maintenir grippé, un secteur déjà malmené.
(Crédits : DR)

Depuis le 17 mars, chirurgiens-dentistes, assistantes dentaires, laboratoires de prothèse dentaire et l'industrie dentaire en général ont un point commun : l'absence d'activité, confinement et décision du Conseil de l'ordre des chirurgiens-dentistes de cesser toute activité, obligent.

Une situation inédite qui est un peu l'arbre qui cache la forêt de la vraie problématique : comment éviter que la filière toute entière ne sombre. Car telle est bien l'interrogation.

Et le sujet est d'autant plus prégnant que le déconfinement approche, synonyme de reprise, certes partielle mais reprise tout de même, de l'activité économique.

Un sujet qui ne laisse pas vraiment Philippe Veran indifférent. Le PDG de Biotech Dental, spécialiste de la fabrication d'implants dentaires, subi les effets collatéraux de la situation. Sans surprise. Mais pas avec attentisme non plus. Au point d'avoir établi un plan d'action, ou plutôt un guide de bonnes pratiques, histoire de penser solutions et pas problème.

Apporter une valeur ajoutée

Tout part des raisons évoquées par le Conseil de l'Ordre des chirurgiens-dentistes pour expliquer la fermeture des cabinets. Au rang desquelles figurent le manque de masques FFP2, l'usage des turbines et des contre-angles capables de générer des aérosols et la proximité avec les patients, évidemment.

"Nous avons créé une cellule de réflexion afin de définir comment reprendre l'activité et en même temps rassurer les patients", explique Philippe Véran qui s'est donc entouré de chirurgien-dentiste, de virologues, d'universitaire, d'industriels... "de tous les maillons qui constituent cette chaîne de valeur et qui peuvent apporter leur expertise".

Ainsi, le guide des bonnes pratiques répertorie-t-il les innovations et produits déjà existants pouvant être utilisés, comme ce désinfectant made in USA mais pour lequel "nous sommes en train d'obtenir le marquage" et qui sert la purification de l'air. Ou cette tablette en plexiglas interchangeable, qui se place sur entre le patient et le dentiste. Biotech Dental a également produit un modèle spécial de visières adaptées à l'usage des chirurgiens-dentistes.

"Il est essentiel de faire bouger la profession", souligne Philippe Veran qui rappelle aussi que les cabinets dentaires sont de différentes tailles, que tous ne sont pas égaux face à l'innovation et la digitalisation et que la problématique de gestion de flux des patients reste une problématique que chacun devra considérer.

Plus globalement, "ce genre de crise remet en cause les modèles économiques" et le secteur dentaire, comme d'autres, n'y échappe pas.

0,5 % de contribution au PIB

Pour que ce guide ne demeure pas un catalogue de bonnes intentions, il a été envoyé dès ce 20 avril en haut-lieu - c'est-à-dire au gouvernement - ainsi qu'au Conseil de l'Ordre des chirurgiens-dentistes. Et Philippe Veran d'en rajouter une couche. "La filière dentaire en France ce sont 42 000 chirurgiens-dentistes, 50 000 assistants dentaires, 18 000 salariés des laboratoires de prothèse dentaire et 30 000 personnes issues de l'industrie. C'est 11 Mds€ générés et 0,5 % du PIB. Les cabinets dentaires sont sous perfusion. Le soin dentaire n'est pas une activité non essentielle. Elle doit être pratiquée".

Parallèlement, le PDG de Biotech Dental réfléchit à la constitution d'un fonds d'abondement qui permettrait aux entreprises de contribuer au financement du système de santé. "Les entreprises pourraient verser jusqu'à 10 % de leur bénéfice net après impôt, au moment où elles le désirent. Cela serait inscrit au bilan, en actif et en passif. Ce fonds d'Etat permettrait de construire et d'équiper les hôpitaux. Je ne désespère pas que de cette idée, il en naisse quelque chose de concret"... De nouveaux modèles, assurément, émergeront de cette crise...

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Commentaires 2
à écrit le 21/04/2020 à 10:40
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J'ai plus mal pour les personnes qui se coltinent une rage de dents depuis des semaines, que pour les porte-feuilles de chirurgiens dentistes et de leur complices prothésiste. Le confinement ne change rien pour l'exercice. Ma dentiste a toujours p...

à écrit le 21/04/2020 à 10:11
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"un secteur déjà malmené" Il faut voir les tarifs pratiqués par l'ensemble des acteurs de la filière, le faible taux de remboursement alors que chaque citoyen devrait avoir les dents en parfait état. Que ce soit du fait de la cupidité des actionn...

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