Emilie Girard, aux origines du MuCEM 3/3

Conservatrice en chef du patrimoine, commissaire d'exposition ou encore à la tête du Centre de conservation et de ressources, elle est au cœur des activités du musée national qu'elle a rejoint à Marseille quand il n'était qu'un embryon de projet basé à Paris.
(Crédits : Mucem / Yves Inchierman)

Elle est l'une des plus anciennes membres du MuCEM. "J'ai tout de suite voulu rejoindre le projet, c'était en 2006, mon professeur Michel Colardelle était alors directeur et le sujet me passionnait", raconte Emilie Girard, aujourd'hui directrice scientifique du musée. "A l'époque nous espérions une inauguration pour 2009", s'amuse-t-elle. Finalement, le musée des Civilisation de l'Europe et de la Méditerranée, de son vrai nom, sort de terre au bout du vieux port de Marseille en 2013. La cité phocéenne est alors capitale européenne de la culture.

Pour la grande inauguration de ce nouveau lieu appelé à devenir l'un des lieux emblématiques de la ville, Emilie Girard travaille sur la galerie de la Méditerranée. "Sur la partie Jérusalem, en lien avec ma formation", ajoute-t-elle. Plus précisément son "premier amour d'étudiante" à savoir l'archéologie chrétienne et la "ludique" langue copte. Deux disciplines qu'elle aborde au sein de l'école de Louvre qu'elle rejoint "par goût de l'Histoire et de l'art plus qu'avec une idée de carrière en tête".

Travailler pour un musée qui n'existe pas

Au sein de l'établissement parisien, cette "mi-savoyarde mi-lyonnaise", comme elle se décrit, découvre également la conservation. "C'était une évidence, s'exclame-t-elle. Je sais que cela peut faire bondir certains de mes confrères, mais ce qui m'a attiré c'est le côté spectacle avec la volonté de montrer des belles choses, de les mettre en lumière. Et puis ça allait bien aussi avec ma tendance au rangement".

Après son concours, Emilie Girard opte donc pour le MuCEM où elle fait ses premières armes depuis Paris. "Ce sont des années denses et porteuses, je travaillais avec beaucoup de responsabilités et sur des problématiques très variées, la conservation, la définition de l'axe scientifique ou les expositions", raconte-t-elle.

Ouverture et critiques sur les expositions

Après deux ans en électron libre, elle endosse en 2008 le costume de directrice du département des collections du musée, du centre de conservation et de ressources du MuCEM en plus d'assurer régulièrement le commissariat d'exposition. Dans un premier temps, il faut surtout s'occuper du déménagement des œuvres à Marseille. Un chantier débuté en 2005 et dont la dernière pièce arrive au MuCEM en 2014. "C'est un déménagement normal... mais à l'échelle d'un musée, nous avons 1 million d'items", explique Emilie Girard. Autant d'objets qu'il faut vérifier, étiqueter et déplacer.

Dès l'ouverture, ce nouveau musée fait parler pour son architecture et de sa sublime vue sur la mer qui font de l'ombre à l'offre culturelle. "Il ne s'agit pas d'un obstacle, cela permet d'attirer du monde", juge Emilie Girard. Mais rapidement, le contenu des salles d'expositions s'attire des critiques. Celle permanente a d'ailleurs été changée. "Nous nous sommes manqués, cela prouve qu'il ne faut pas être assis sur ses convictions. Nous nous sommes décomplexés, nous voulions trop coller à une image de musée de société et de civilisation. Nous avons dû sortir de notre zone de confort", répond Emilie Girard. "Une bonne exposition c'est quand les gens viennent et repartent content pas seulement celles avec un contenu scientifique irréprochable", enchaîne-t-elle.

Commissaire d'expositions

Elle défend un MuCEM comme un "musée de société" qui dispose de "grandes libertés de thématiques" afin de s'adresser au grand public à la différence des arts et métiers. "Nous avons une liberté de ton et de forme, défend Emilie Girard. L'identité du MuCEM était floue au début mais aujourd'hui elle se fixe. Nous ne sommes pas sur de la peinture ou sculpture figée mais sur du questionnement et de la mise en dialogue".

Des valeurs qu'elle applique lorsqu'elle assure le commissariat d'exposition comme pour Food en 2014, Un génie sans piédestal, Picasso et les arts et traditions populaires en 2016 ou l'année dernière pour On Danse ?. Ce dernier thème tient particulièrement à cœur à Emilie Girard grande amatrice de danse classique. Mais c'est bien celle sur le peintre espagnol qui reste son meilleur souvenir. "C'était une très jolie expérience car j'ai travaillé avec Joséphine Matamoros et Bruno Gaudichon, deux grands spécialistes", explique-t-elle.

Le rôle social durant le confinement

En parallèle de ses fonctions au MuCEM, la conservatrice en chef du patrimoine occupe également le poste de vice-présidence au sein du conseil international des musées (Icom) France. Une association interprofessionnelle qui regroupe à travers le monde 50 000 membres. "C'est un engagement qui me tient à cœur, j'y ai tout de suite adhéré", assure Emilie Girard. Au contact de différents acteurs, elle constate aussi le place que prend le musée national marseillais auprès des professionnels. "Nous commençons à être repéré, y compris par des réseaux des beaux-arts qui commencent à s'interroger sur la place du sociétal", rapporte Emilie Girard.

Maintenant, elle espère continuer la dynamique du musée qui commence à trouver son rythme de croisière. Une exposition inattendue est en cours. Inattendue car elle est liée au covid-19 puisqu'elle concerne les objets du confinement. Une grande collecte sur ce thème a eu lieu pendant la crise sanitaire. "Nous avons joué pleinement notre rôle social, le musée s'est positionné comme un interlocuteur tiers", estime Emilie Girard. Mais l'objectif reste le même. "Nous voulons faire connaître d'avantage le MuCEM et ses œuvres, j'aimerais faire venir plus du monde". Et pas que pour la vue.

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