Où en est Cannes on Air ?

Imaginé à l’aube des années 2010, le projet territorial de la Cité des Festivals, qui entend capitaliser sur son image de temple du cinéma pour devenir le pôle d’attraction de l’économie créative et audiovisuelle, se concrétise de plus en plus dans un contexte de crise sanitaire qui conforte la Ville dans la pertinence de développer des filières autres que celles du tourisme et du tourisme d’affaires.
(Crédits : DR)

Quand le tourisme prend froid, c'est toute la ville de Cannes qui tousse. Le constat n'est pas nouveau. Des caps difficiles à passer, il y en a eu ces dernières années. Aujourd'hui, c'est la crise de la Covid-19 qui vient défier la capacité de résilience de la Cité des Festivals fortement dépendante de la filière touristique. Laquelle pèse, si l'on prend pour périmètre l'agglomération Cannes-Lérins, un quart du PIB. "A chaque fois, on sent bien la nécessité de diversifier notre économie pour faire en sorte que tout ne repose pas sur le tourisme d'affaires, de loisirs et de luxe", note Thierry Migoule, directeur de cabinet du maire David Lisnard. D'où la volonté de multiplier les pas de côté, que ce soit en direction de l'aérospatiale, du nautisme et, bien sûr, de l'audiovisuel.

C'est en effet tout l'enjeu du projet territorial Cannes on Air : capitaliser sur son image de temple de cinéma pour structurer une filière dédiée à l'économie créative et audiovisuelle en assemblant, maillon après maillon, une chaîne de valeur qui se veut unique en Europe. Un projet caressé de longue date qui, au fil des ans, s'est précisé, affiné, complété pour devenir "une démarche globale" où la diffusion, la formation et la production forment un tout désormais de plus en plus concret.

Former

En atteste d'abord la livraison, en octobre dans le quartier La Bocca, à l'ouest de la ville des 8 100 m² du Campus universitaire (80,3 M€), aujourd'hui en cours d'équipement pour une ouverture programmée en janvier 2021. Un bâtiment mutualisé d'une capacité d'accueil de 1 000 étudiants qui entend notamment croiser les formations axées sur les nouveaux médias et les nouvelles écritures avec le monde de l'entreprise via l'implantation au sein d'un espace dédié de 2 000 m² de sociétés liées à l'économie créative. "Trente-sept formations y seront proposées en relation avec Université de la Côte d'Azur mais aussi, sous forme de chaires ou de résidences, avec l'INA, Vivendi, Canal+, Serial Eyes, le Festival de Cannes, CanneSéries ou encore Banijay", la société de production de Koh Lanta et de Cyril Hanouna, dont le premier programme de formation intensive portant sur la création des émissions audiovisuelles de demain s'est achevé le 30 octobre. L'idée étant bien de "faire de Cannes la capitale des écritures pour les films, les séries et les flux (divertissements, jeux)", rappelle le directeur de cabinet. Quant au multiplexe de 12 salles porté par la Compagnie cinématographique de Cannes - dont l'investissement s'élève 32 M€ - voisin du campus, il devrait ouvrir ses portes lui aussi en début d'année si les contraintes liées à la situation sanitaire se desserrent.

Diffuser

En atteste ensuite l'attribution cet été du marché d'assistance à maîtrise d'ouvrage (budget : 1M€) du projet de Musée international du Cinéma et du Festival de Cannes à l'équipe pluridisciplinaire pilotée par Universcience. Premier établissement public national de diffusion de la culture scientifique, il gère à Paris le Palais de la découverte et la Cité des sciences et de l'industrie. Ses premières conclusions sont attendues fin janvier. Elles porteront sur le contenu culturel du projet, son montage financier - "forcément en PPP" - et le choix du site d'accueil, en balance entre le secteur Picaud, qui tient la corde, et celui dit d'AnsaldoBreda. La deuxième échéance est fixée à mai prochain, date à laquelle le groupement devra rendre "le ou les programmes détaillés culturels, techniques et environnementaux, ainsi que les pièces administratives et juridiques en vue de lancer la mise en concurrence".

Et Thierry Migoule de préciser : "Nous souhaitons un équipement ludo-éducatif, interactif, immersif et inédit. Cinq modules le composeront dont trois dédiés respectivement au festival de Cannes, aux effets spéciaux et nouvelles technologies et à l'histoire du cinéma mondial avec un pavillon confié aux grandes institutions en charge de la préservation, la restauration et la diffusion du patrimoine cinématographique. Les deux autres espaces seront réservés aux conférences et expositions d'une part, aux entreprises du cinéma, de l'autre, qui pourront y présenter leur activité". Estimé à 200 M€, cet objet culturel et touristique se veut "d'envergure internationale" à l'image du Guggenheim ou de Beaubourg. Les premiers modules sont espérés en 2025 avec l'ambition d'asseoir un peu plus la place de Cannes comme une des capitales mondiales du 7e Art ou, pour le moins, d'étirer sa visibilité en la matière en amont et en aval de la remise de la palme d'or.

Produire

En atteste enfin la volonté réaffirmée de la cité azuréenne de voir se développer sur son territoire une ou plusieurs offres de production, à travers l'accueil de studios de tournage et de post-production portés par le privé. Le campus en sera doté, certes, mais pour Thierry Migoule, "il s'agit d'aller plus loin" pour "bien boucler la boucle". D'où les projets de transformation de friches industrielles sur lesquelles la collectivité a la main et qu'elle destine à cette activité. En centre-ville d'abord, avec le lancement d'une procédure d'expropriation pour un local de 700 à 800 m² récemment identifié comme propice. Lequel se trouve à proximité de l'ancien Comptoir provençal du verre, posé sur 1 000 m² que deux entrepreneurs issus de la filière audiovisuelle souhaitaient transformer en studios post-prod dernier cri. Le projet n'a pas pu se faire, faute de financement, mais, insiste le directeur de cabinet, "nous sommes toujours dans cette logique de nécessité. Les visites se poursuivent".

En attendant, du côté de La Bocca, le projet Novelty suit son cours. Ce leader des prestations techniques pour l'événementiel travaille avec la Ville depuis plusieurs mois afin de regrouper ses activités azuréennes et monégasques sur l'ancien site industriel AnsaldoBreda. Soit, 5,7 hectares que le groupe francilien aux 211 M€ de chiffre d'affaires entend toujours acquérir malgré l'impact de la Covid-19 sur son activité. La promesse de vente devrait être signée d'ici à la fin de l'année. Jacques de la Guillonnière, son PDG, l'a en effet confirmé mi-octobre auprès de La Tribune, insistant sur "le temps long" du projet, jaugé à une centaine de millions d'euros, et sur le fait, que "indépendamment de la crise actuelle, nous avons des problématiques de place qui freinent notre développement". D'où la volonté d'y construire des espaces de stockage, auxquels s'ajouteraient des espaces de tournage, de restauration, des bureaux, une école, des logements pour étudiants et intermittents afin de servir ses activités et celles de ses futurs partenaires, tous liés à l'événementiel, l'image et l'économie créative. Bref, le clap de fin n'est pas pour demain.

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