Comment La Verrerie de Biot s'ancre dans l'industrie

Créatrice du verre bullé, l'entreprise installée à Biot, près d'Antibes, s'empare des défis de son secteur, entre stratégie touristique, impact du numérique et conservation d'un métier d'art. Un triptyque qui demande un certain équilibre, ajusté par sa dirigeante, Anne Lechaczynski.

La Verrerie de Biot est un peu comme un chat. Secouée par les inondations d'octobre 2015 qui ont dévasté son outil industriel et son site, engendrant des dégâts s'élevant à 3 M€, la PME familiale ne s'est pas laissée abattre, s'engageant immédiatement dans une phase de reconstruction, matérielle aussi bien que mentale. Une volonté de rapidement retomber sur ses pattes, portée par Anne Lechaczynski. La dirigeante de l'entreprise le dit "l'avenir nous intéresse, pas le passé". Ce qui ne signifie pas pour autant de ne pas tirer les leçons d'une catastrophe qui aurait bien pu définitivement mettre à mal ce fleuron azuréen aux 700 000 visiteurs annuels, aux 25 employés (35 en période d'activité intense) et au chiffre d'affaires consolidé atteignant 3,5 M€.

Projection avant

Regarder vers l'avenir cela signifie intégrer le fait qu'un épisode tel celui du 3 octobre 2015 pourrait se reproduire. Alors "nous avons pris un hydrologue pour comprendre ce qu'il s'est passé et ce que l'on peut faire pour éviter que cela ne se reproduise. Il nous faut absolument adresser le problème, suivre ces mouvements méditerranéens. Le développement économique est normal, on doit continuer à développer le territoire, mais on ne peut pas dire que l'on ne peut pas canaliser les eaux pluviales".

D'un point de vue économique, la saison estivale 2017 s'est révélée positive, nourrie par le retour en force des touristes américains - merci l'ambiance politique internationale notamment celle des pays anglo-saxons - au pouvoir d'achat non négligeable ainsi que la clientèle venue du Nord de l'Europe. Pourtant, si les stigmates des inondations ne sont plus visibles, dans les faits et le stock, il reste encore des traces. Deux ans vont en effet être nécessaires pour retrouver le niveau avant intempéries, notamment pour certaines couleurs. Mais si la PME biotoise relève la tête c'est aussi dit Anne Lechaczynski parce que les autochtones sont venus consommer Verrerie de Biot, "les locaux nous ont fait repartir".

Conservation et promotion

Métier d'art rime bien sûr avec innovation, et pour cette Entreprise du Patrimoine Vivant, il y a un savoir-faire à conserver et à faire fructifier. "Le métier de souffleur de verre va demeurer un métier de l'œil et de la main". Un slow mouvement car on le sait peu mais souffler pour donner naissance à un produit fini le plus parfait possible, exige de longues années d'apprentissage, au sens premier du terme. "Trois ans sont nécessaires à un apprenti pour qu'il soit productif et dix ans pour qu'un verrier soit capable de fabriquer l'ensemble de nos produits". Alors bien sûr, Anne Lechaczynski est plutôt favorable à l'apprentissage à 14 ans. "Il ne faut pas attendre l'échec scolaire du jeune. Et arrêtons d'appeler cela CAP ou Bac Pro, mettons plutôt en avant le fait que l'apprentissage c'est extraordinaire. Il existe différentes intelligences, il n'y en a pas une meilleure qu'une autre". Surtout que, malgré tout, "on comprend mieux ce qu'est un métier d'art aujourd'hui qu'il y a 15 ans".

Nouveaux marchés

Un métier qui s'ouvre aussi de nouvelles pistes de développement. "Nous avons le tourisme, mais aussi l'exportation, les réseaux de magasins et les décorateurs. Les magasins de décoration sont un nouveau réseau à démarcher. Il faut s'adapter tout en restant un métier d'art". Le tourisme, cette industrie non délocalisable, est un sujet "horizontal et non vertical". Ce qui constitue aussi un début de réponse à la question : faut-il un ministre du tourisme ? "En France, si on n'a pas le label "ministre", on est perdus, on souffre d'un manque de reconnaissance. Faut-il un ministre rattaché au premier ministre ? Il y a peut-être une représentation à mettre en place mais elle doit être transversale".

L'international est évidemment un axe qui doit être regardé, mais avec méthode. "Il faut aller chercher les marchés là où ils sont. Le marché est mondial. On ne peut pas rester sur le marché franco-français. Cependant, l'international demande un certain investissement. Il faut aller tester son marché, avoir le bon produit", égrène celle qui est aussi conseiller au commerce extérieur de la France. "La meilleure solution, surtout pour des primo-exportateurs, c'est le voyage de groupe car des stimuli se créent. Le chasser en meute c'est s'aider les uns, les autres. Le chef d'entreprise doit être curieux, regarder autour de lui, le monde évolue, le chef d'entreprise doit évoluer aussi". Une capacité à être souple, adaptable, agile comme on le dit aujourd'hui des startups. "Nos métiers sont de vieux métiers, ils se sont toujours adaptés et ils vont continuer à le faire."

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