Jacques de la Guillonnière – Novelty : « En l’accordant à la stratégie Cannes on Air, notre projet d’implantation s’est considérablement enrichi »

Avec l’acquisition prochaine de la friche industrielle AnsaldoBreda, le groupe leader de la prestation technique pour l’événementiel, originaire de Longjumeau, veut faire coup double : servir ses besoins sur le marché de la Côte d’Azur, son deuxième pôle d’activité après Paris, et contribuer à la dynamique du projet territorial porté par la Ville de Cannes qui vise à développer une filière économique autour de l’audiovisuel et des industries créatives. Entretien avec le président d’un groupe qui a tout à y gagner.
(Crédits : DR)

La Tribune - Il y a un peu plus d'un an, s'ouvraient les discussions avec la mairie de Cannes portant sur le rachat des 5,7 hectares du terrain dit ex-AnsaldoBreda. La crise de la Covid-19, qui heurte de plein fouet toute la filière événementielle sur laquelle évolue le groupe Novelty-Magnum-Dushow, a-t-elle changé la donne ?

Jacques de la Guillonnière - Non, parce que nous sommes sur du temps long. Si la promesse de vente du terrain sera signée dans un délai relativement proche, il y a tout un temps administratif et de construction du projet qui nous conduira, je pense, à une première tranche de livraison d'ici à trois ou trois ans et demi. Par ailleurs, indépendamment de la crise actuelle, nous avons des problématiques de place qui freinent notre développement. La donne qui a changé, finalement, c'est celle des délais : avant nous étions très pressés, aujourd'hui nous le sommes un peu moins. Mais le besoin est toujours là.


En quoi consiste votre projet ?

Au départ, il s'agissait de regrouper sur un même site l'ensemble des activités de nos entreprises azuréennes et monégasques, notamment en termes de stockage. La Côte d'Azur et plus largement le littoral régional, entre Marseille et Monaco, représentent le deuxième pôle d'activité du groupe Novelty-Magnum-Dushow, d'où ce besoin de vastes surfaces. Et puis, au fil des discussions, le projet s'est enrichi à la demande de la mairie de Cannes avec l'idée d'y développer, de façon partenariale, tout un écosystème consacré à la filière événementielle et aux industries créatives, le propre de la stratégie Cannes on Air. Un peu à l'image de ce que nous avons fait à Paris. Là-bas, nous possédons un grand studio Dushow dans lequel les artistes peuvent venir répéter, nous sommes également actionnaires dans une école de management et un incubateur de start-ups dédiés à notre secteur, et nous travaillons, au travers d'un GIEC que nous avons contribué à créer, à la réinsertion par nos métiers des jeunes en difficulté en collaboration avec les Orphelins Apprentis d'Auteuil.

Comment cela va-t-il se traduire concrètement ?

Difficile à dire précisément, le projet est très global et se construira en fonction des opportunités et des entreprises ou organisations partenaires qui souhaiteront s'y greffer. L'idée étant, indépendamment de notre activité qui occupera une partie du site, de répondre aux besoins de la filière en proposant un studio de cinéma ainsi que des espaces de stockage, de bureaux éphémères ou non, de logements pour étudiants et intermittents, de restauration... Il s'agit de faire revivre ce quartier de la Bocca, non pas en se focalisant sur une activité industrielle, mais en créant de l'attractivité.

Pour quel coût ?

Là-aussi, difficile à dire précisément. Disons qu'au regard de l'ambition du projet, l'enveloppe tournerait autour des 100 millions d'euros.

Quels intérêts stratégiques le groupe y trouve-t-il en dehors de la réponse à la problématique de place ?

Ils sont plusieurs. D'abord, en termes de formation. La proximité du Campus universitaire est un atout. On peut en effet imaginer, via un partenariat, de mettre à disposition des futurs étudiants un lieu et du matériel pour qu'ils puissent concrètement apprendre sur les technologies les plus récentes pour lesquelles nous investissons chaque année entre 10 et 12% de notre chiffre d'affaires, ce que peut difficilement faire une école. Il ne faut pas oublier que, dans nos métiers, toute une génération va s'en aller et nous avons besoin de jeunes formés au numérique, à l'image et à la vidéo. Il y a ensuite un aspect visibilité extrêmement intéressant pour notre groupe. On parle de Cannes, une ville connue dans le monde entier, une ville qui accueille des professionnels du monde entier, et le fait d'y avoir une belle représentativité peut nous servir dans le cadre de notre développement à l'international, la piste de croissance privilégiée par le groupe.

Le groupe justement. Comment vit-il sous l'ère Covid-19 ?

Il n'est pas à l'arrêt. Cet été, nous avons pu faire des sons et lumières, nous avons également fait le départ du Tour de France à Nice, quelques tournées sur des petites jauges et surtout le Big Tour avec Bpifrance. Sans doute la seule tournée de cette ampleur (23 villes pour 15 millions de visiteurs en présentiel et virtuel) de l'année. Puis, à la rentrée, on a un peu accéléré avec les défilés, avant que le marché se referme de nouveau, ce qui nous fait craindre un exercice 2020-2021 (le groupe clôture au 31 mars, NDLR) à 35% du chiffre d'affaires habituel (211 M€ en 2019-2020 - voir encadré - NDLR). Toutefois, nous restons actifs. Nous allons rédiger un courrier au président de l'association des Maires de France pour lui rappeler que les festivités de Noël peuvent se traduire par des éclairages de places ou de monuments, par des sons et lumières en extérieur, afin de faire travailler nos entreprises. Il y a également un travail à mener auprès des ministères de la Culture et de l'Economie pour notamment prolonger le dispositif de chômage partiel jusqu'à ce que l'activité reprenne. On espère courant juin 2021, même si l'on table plutôt pour septembre.

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Encadré :

Comment le Groupe Novelty-Magnum-Dushow repense son activité

Fondé à partir de la fin des années 80 par une succession de croissances externes, le groupe Novelty-Magnum-Dushow est spécialisé dans les prestations techniques (son, éclairage, vidéo, distribution électrique et structures) pour l'événementiel (défilés, expositions, assemblées générales, conventions, concerts...). Des opérations éphémères qui réunissent de 10 à plusieurs centaines de milliers de personnes. Implanté en région parisienne (3 sites), en Province (Bordeaux, Nantes, Valence, Lyon, Marseille, Nice, Mandelieu) et à l'international (Monaco, Bruxelles, Londres, Barcelone, Marrakech, Dubaï et Dammam en Arabie Saoudite), il a réalisé au 31 mars 2020 un chiffre d'affaires de 211 millions d'euros pour 820 collaborateurs permanents, une force que le groupe souhaite préserver en dépit de la chute d'activité qui paralyse le secteur. "Cette crise du Covid-19 nous a donné du temps de réflexion, explique Jacques de la Guillonnière. Avec cette question : que proposer à nos clients quand on ne peut plus se rassembler ?" Pour le groupe francilien, cela s'est traduit par l'organisation de conventions virtuelles depuis des studios montés pour l'occasion afin de proposer "un endroit un peu dynamique, avec une jolie déco, de jolies lumières, et tous les moyens de communication qui vont bien, notamment en termes d'interactivité". Picard, par exemple, a opté pour ce dispositif qui reliait 18 de ses sites en France. "Nous avons parallèlement développer une nouvelle activité autour des studios virtuels", reprend le président. Celle-ci consiste à proposer via des écrans LED des décors virtuels où tourner des clips, séries ou films. Des murs LED auparavant "utilisés au quotidien" sur les marchés, conventions et autres salons, qui trouvent aujourd'hui une nouvelle vie.

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