Marcel Ragni : « La gestion de l’entreprise passe par l’humain »

Il fait de la PME familiale, spécialiste de solutions d’éclairage pour l’espace public, une entreprise industrielle structurée, ancrée dans l’innovation, très attentive au lean manufacturing et extrêmement engagée dans la RSE. Une dimension sociétale qui se retranscrit dans la réalisation même de son nouveau siège où s’installe une partie de l’unité de production. Une façon de démontrer - parce qu’il en est encore besoin – que l’industrie peut être résolument moderne, à tous points de vue.
(Crédits : DR)

C'est un bâtiment qui surprend presque au détour de la route qui mène vers Ragni. Blanc, élégant et vitré, le nouveau siège de l'entreprise familiale pourrait presque être la vitrine de cette modernité que revendique le monde industriel, désireux de démontrer qu'il a changé, en profondeur, durablement.

C'est sur le site même de son implantation historique que la PME spécialiste des solutions d'éclairage public a dessiné, conçu, construit un bâtiment à l'image de la philosophie de son président. Parce que oui, Marcel Ragni a bien une vision particulière de son entreprise. Comme de son secteur, l'industrie.

ragni siège 3

Adapter le savoir-faire

Ragni est née il y 93 ans et est alors spécialisée dans la ferronnerie d'art. Face aux évolutions du monde qui se modernise, la petite entreprise familiale adapte son savoir-faire. Créé des lanternes, innove en utilisant l'inox à la place de l'acier zingué. En 1989 - avec le français Clarel, spécialiste de l'éclairage routier - puis en 1993, avec l'italienne Soldi e Scati, les opérations de croissance externe donnent encore plus d'envergure à la société. « Nous devenons alors de vrais éclairagistes », raconte Marcel Ragni. « Nous faisions tout ce que les autres éclairagistes ne voulaient pas faire, nous avions les compétences pour réaliser ce qui n'existait pas dans les catalogues ».

A plus de 90 ans, voilà donc Ragni toujours solidement ancrée. Sur le territoire - hors de question de quitter Cagnes-sur-Mer et le site historique - et dans l'innovation. Le nouveau bâtiment est évidemment une réponse aux besoins. Besoin de place, d'espaces adaptés à la production mais aussi besoin de confort pour les salariés. Un bâtiment né de « trois ans de travaux, de réflexions et de modifications communes », explique Marcel Ragni. « Nous faisions face à un manque de place pour la production et il nous fallait structurer la logistique. Nous avons donc imaginé un drive avec la production au sein du siège qui ne gère plus le stock, c'est le centre logistique qui livre ce qui est commandé. Nous voulions que ce bâtiment soit aussi un lieu de convivialité, avec le confort dont ont besoin les salariés ». L'environnement de travail est un sujet primordial pour Marcel Ragni - il a d'ailleurs installé un espace sportif au sein du nouveau bâtiment - expliquant qu'il faut utiliser les moyens nouveaux existants et adapter ceux-ci aux besoins de l'entreprise. Que l'aménagement des horaires, par exemple, pratiqué au sein de la PME, a pour conséquence de rendre les salariés plus apaisés, à même de mieux remplir leurs missions. Que c'est aussi une question de confiance.

Ragni siège 2

Les 4 000 m2 qui s'élèvent donc au bout du chemin qui mène à la PMI dédient 2 500 m2 à la logistique et 1 600 m2 à l'administration et aux lieux de convivialité. Comme cette salle de gym donc, mais aussi la salle de vie et la salle de réunion équipée comme il faut de tous les moyens de communication.

Cependant le bâtiment historique n'est pas pour autant oublié. Le projet désormais est de modifier les accès pour, à terme, lui permettre notamment l'accession aux personnes à mobilité réduite. Une partie du bâti actuel sera rasé afin d'agrandir l'espace de production, la partie jusqu'alors dédiée aux stocks, récupérée, le tout devant accompagner la croissance espérée. Les travaux devraient démarrer en début d'année prochaine et rendre l'ancien siège à l'image du nouveau.

La mixité, valeur ajoutée

Mais Marcel Ragni a également une volonté : accélérer sur la mixité et pour cela faire entrer davantage de profils féminins en production. « La production permet la mixité », assure-t-il, ce qui évidemment envoie un message - et non des moindres - sur cette industrie que certains ne voient pas encore comme résolument ouverte et moderne. L'industrie 4.0 est évidemment un axe majeur dans cette nécessaire vision revue et corrigée de l'industrie traditionnelle. « L'industrie 4.0 nous fait réaliser ce qui est bien et ce qui est moins bien dans nos habitudes ancrées. Il faut être ouvert aux idées, aux personnes », insiste le président de la PME qui s'est très vite aussi intéressé au lean management. Qu'il faut « inclure à tous les niveaux et tous les étages » dit-il, sinon l'intérêt est moindre. Chez Ragni, cela s'est traduit par la création d'un Comex, « parce qu'il fallait impliquer encore davantage les responsables, pour qu'il y ait un fil conducteur commun ». Et puis tout simplement « parce que le sujet du Comex c'est l'entreprise ».

Et non, l'industrie 4.0, « ce n'est pas la robotisation. C'est mettre l'intelligence artificielle à disposition pour profiter de l'intelligence humaine. L'IA est issue de l'intelligence humaine. Il faut profiter des nouvelles technologies pour enlever de la pénibilité au travail. Les machines performantes sont là pour maintenir ou augmenter les emplois et les compétences », insiste Marcel Ragni. « Cela va bien avec mon esprit de gestion car ce n'est finalement que du bon sens. La gestion de l'entreprise doit passer par l'humain ».

Ragni famille

La RSE c'est aussi un dada pour la PMI et son président. « C'est l'avenir », assure Marcel Ragni. « Le préventif bouscule les esprits. C'est un changement dans la façon de réfléchir. C'est aussi avoir du sens critique ».

Et oui, le développement durable - dans toute la signification que revêt le terme - est un acte qui relève de l'entreprenariat. « Lorsqu'on est à la tête d'une entreprise familiale (Jean-Christophe et Stéphane Ragni, les fils de Marcel sont directeurs généraux NDLR), on pense obligatoirement à l'après. Le développement durable, c'est vouloir que l'entreprise survive après moi. C'est vouloir faire vivre un confort aux autres, un confort qui créé le mien ».

Ne pas avoir peur d'innover

Aujourd'hui, Ragni (CA : 56 M€ - 120 salariés) est toujours une entreprise d'éclairage. Mais celui-ci est de plus en plus finement intelligent. Un éclairage qui mesure, capte, sécurise, enregistre, voit... « Désormais nous ne vendons plus de luminaires mais nous vendons des points lumineux intelligents. Le luminaire n'est pas créateur de valeur. Les Chinois le font par cargaisons entières. Ce qui compte maintenant c'est le service, la proximité, la réactivité... » La compréhension des besoins et la capacité à y apporter la réponse la plus pointue et innovante possible aussi. « L'évolution de nos produits et de l'entreprise sont faites car certains vous tirent vers le haut : les architectes, les concepteurs lumière, les élus... » rappelle Marcel Ragni.

Ragni travail

Le projet Manarati - mené dans le cadre d'un mémorandum d'entente avec Innogy IME, JV entre Innogy Europe et DEWA (en charge de l'eau et de l'électricité à Dubaï NDLR ) - dont le candélabre a été designé par Porsche, a l'avantage d'avoir aussi nourri la R&D et donné naissance à d'autres produits. « Il ne faut pas avoir peur d'essayer d'être innovant », encourage Marcel Ragni. Qui n'a pas davantage peur d'aller à la conquête de marché export, pas forcément là où cela paraît le plus aisé. Aux Etats-Unis, à Denver, Ragni qui y emploie 12 personnes, a des projets en cours. Comme en Bosnie, où l'équipe de 5 personnes déploie aussi les innovations de la PME azuréenne. En France, Novéa spécialiste de l'éclairage solaire, continue sa croissance sur le marché national. S'il compare volontiers l'entreprise à une vieille dame de 90 ans, Marcel Ragni estime que « toutes ces évolutions » en font finalement « une jeune fille ». Une mélange d'expérience et de fougue...

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