Pourquoi Carbon Bee a remporté le prix national "Viticulture et numérique"

Grâce à sa caméra hyperspectrale, capable de détecter les maladies des vignes, la start-up basée dans la Drôme a séduit le jury du prix national co-organisé par la French Tech Culture. Une réelle rupture technologique qui va bouleverser le secteur viticole.
Le capteur développé par Carbon Bee permet de détecter les maladies atteignant les vignes grâce à sa vision en infrarouge.

Déceler, bien avant l'œil de l'homme, les maladies qui abîment les pieds de vignes. Les vignerons en ont rêvé, Carbon Bee le fait. C'est en répondant à la demande d'une coopérative agricole basée dans la Drôme, soucieuse de détecter le stress hydrique dans le végétal que Gérald Germain, ingénieur de formation, met au point une caméra, capteur capable de voir en infra-rouge, soit une centaine de couleurs. Et donc de détecter, avant l'œil de l'homme, le manque dont souffre la plante.

Révolution

Une solution qui modifie le travail de l'agriculteur et qui surtout trouve une application révolutionnaire en viticulture, notamment pour ce qui concerne la flavescence dorée, un fléau qui condamne chaque année des milliers de ceps, 16 591 en 2015 selon les chiffres de la Fredon (fédération régionale de lutte et de défense contre les organismes nuisibles) PACA. "Cette maladie est un véritable fléau", souligne Gérald Germain, le président de la start-up créée en janvier 2015. En effet, la bactérie responsable de la maladie provoque au final la mort du cep. Surtout, les symptômes ne sont visibles, a minima, à l'œil nu que l'année suivant l'infection.

"Diagnostiquer, avant l'œil de l'homme, que la maladie est présente, permet d'être plus réactif sur le traitement".

Commercialisation proche

En parallèle de la caméra, Carbon Bee développe un logiciel utilisant l'intelligence artificielle. "Nous travaillons avec les différents départements de recherche du ministère de l'Agriculture. Au plus notre logiciel visualise et enregistre de plans de vignes, sains et malades, au plus il est capable ensuite de déterminer et diagnostiquer les maladies", explique Gérald Germain. Si 2016 est l'année de l'expérimentation, 2017 sera celle de la commercialisation. Plus exactement, le capteur le sera d'ici la fin de l'année, le logiciel, l'année prochaine. Le marché visé est donc notamment celui de la viticulture, sachant que la flavescence dorée touche principalement le sud de la France, les régions Occitanie, Rhône-Alpes et PACA. Visés aussi les exploitations du Bordelais ou de la Champagne, les coopératives et les syndicats de viticulteurs. Le poids du capteur - 250 grammes - lui permet d'être embarqué sur un drone ou sur toute autre structure attelée à un tracteur, comme l'enjambeuse, ce tracteur surélevé permettant de travailler entre les rangs et au-dessus des vignes.

Autres applicatifs

Le capteur de Carbon Bee pourrait également être capable de déterminer le taux de sucre dans le fruit, pouvant donner une date approximative du début des vendanges, soit une aide à la décision appréciable. "L'idée est que le capteur puisse donner le maximum d'informations en un seul passage", indique Gérald Germain.

Mais outre cette filière, Carbon Bee voit déjà un applicatif dans les fermes urbaines, ces serres confinées où il n'est pas utilisé d'engrais et où le capteur, disposé sur les rails qui automatisent le procédé, pourraient ainsi vérifier qu'aucune maladie ne se propage. La start-up travaille sur ce projet avec les grands noms du secteur et démarre actuellement des phases de tests, notamment sur la carotte, la mâche ou la pomme de terre. Par ailleurs, elle travaille également étroitement avec Terralia, le pôle fruits et légumes, céréales vignes et vins, basé à Avignon, dont elle est un adhérent et qui lui apporte des compétences en agronomie notamment.

Napa Valley - InterRhône, même intérêt numérique

Ce sont ces compétences et surtout ce qu'elles promettent comme applicatifs qui ont permis à Carbon Bee de remporter les suffrages du jury du premier prix Viticulture et numérique organisé conjointement par la French Tech Culture, Inter-Rhône (association qui rassemble les professionnels de la filière viti-vinicole de la Vallée du Rhône, présidé par Michel Chapoutier, vigneron de Tain l'Hermitage NDLR), le Grand Avignon, le Crédit Agricole Alpes Provence et la French-American Chamber of Commerce de San Francisco. "Notre but est de promouvoir la culture et la culture c'est le patrimoine. Le vin fait partie de l'identité culturelle du territoire. Avec la Chambre de commerce de San Francisco nous nous sommes rendus compte que nous avions des points communs. Ils ont la Silicon Valley et la Napa Valley. Nous avons la French Tech et Inter-Rhône. Ce concours nous permet de nous positionner comme un référent vintech", précise Jean-François Césarini, le directeur général de French Tech Culture. Et si 34 candidats ont postulé à ce premier prix national Numérique et Viticulture, il faut dire que dans l'escarcelle du vainqueur se trouve une formation de 15 jours assurée par French-American Chamber of Commerce de San Francisco sur le go-to-market américain. Une récompense qui va permettre à Carbon Bee de se tester rapidement face aux problématiques de la viticulture yankee, souvent confrontée à la sécheresse. Une expérience dont Gérald Germain attend beaucoup, l'usage de la technologie numérique dans ce secteur étant davantage démocratisé qu'en France. Carbon Bee, qui salarie pour l'heure 4 personnes mais travaille sur le projet avec le renfort de deux free-lance, continue en parallèle son activité de bureau d'études en électronique et informatique embarquée. De quoi générer du chiffre d'affaires - 180 000 euros - lui permettant ainsi d'autofinancer son innovation.

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