Comment Adequabio veut devenir une référence en matière de bactéries photosynthétiques

Située à Pertuis, cette entreprise utilise des bactéries photosynthétiques pour traiter les effluents phytosanitaires. Sa stratégie : se positionner comme une société de conseil experte de la dépollution et exploiter au maximum le potentiel de ses bactéries.
(Crédits : DR)

On connaît bien le mécanisme de photosynthèse chez les plantes : donnez-leur de la lumière, elles vous rendront de l'oxygène. Ce que l'on connaît moins, ce sont les bactéries photosynthétiques, qui, sur le même principe, utilisent la lumière pour se développer. Des petites bêtes colorées qu'a beaucoup étudiées Daniel Garcia, alors chercheur en biologie pour le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). A ce moment-là, il est encore loin d'imaginer que ces bactéries lui ouvriront les portes de l'entrepreneuriat. Il faudra attendre que se présente une série d'opportunités.

La première d'entre elles, c'est la prise de contact avec les établissements Barre, dans le Lot-et-Garonne. Spécialisée dans le matériel agricole, celle-ci propose un système de récupération des eaux contaminées par les pesticides. Elle demande à Daniel Garcia de tester la capacité de ses bactéries à dégrader les pesticides. Ce, alors que la loi oblige les exploitants à gérer ce type d'effluents, souvent générés au moment du lavage de leurs instruments. La première expérimentation est un succès : 85% des molécules actives sont dégradées. "Cela nous a encouragés à aller plus loin", se rappelle Daniel Garcia.

Elimination quasi-totale des molécules contenues dans les pesticides

Le projet est alors présenté au niveau européen. Et là aussi, les résultats sont convaincants : "en optimisant les conditions, les bactéries dégradent 95% des molécules rejetées. Et on a identifié plus de 150 molécules". De quoi prouver non seulement l'efficacité de la solution, mais aussi sa simplicité d'utilisation. "L'agriculteur ne s'occupe de rien pendant 10 ans". En effet, la bâche qui constitue le bassin est garantie sur cette période et ne nécessite aucune manipulation. "Il faut seulement rajouter des bactéries une fois par an sous forme de sachet déshydraté dans le premier bassin".

Financé par l'Europe, Daniel Garcia doit en contrepartie communiquer sur le projet. Il prend alors la mesure du potentiel commercial d'un tel produit. Une demande forte qui s'explique par plusieurs raisons. Un durcissement des législations liées à la protection de l'environnement. La possibilité de subventions pour les agriculteurs qui utilisent un dispositif d'assainissement de leurs effluents. Des changements sociétaux qui poussent les entreprises à afficher une image plus verte. Et en parallèle, des solutions proposées souvent chronophages et difficiles à mettre en œuvre sur la durée.

Tous les feux sont donc au vert, alors Daniel Garcia se lance. Avec son chef de projet, il crée Adequabio en février 2018. Le premier produit s'appelle Phytobarre. La structure - le bassin - est fournie par les Etablissements Barre. L'entreprise aixoise se charge quant à elle des bactéries, des études d'implantation et du calcul de dimensionnement. Parmi les clients : des exploitations viticoles, légumières, arboricoles, de grandes cultures... Localement d'abord, entre Arles et Nîmes, puis prochainement à Bergerac et à Reims. "Et certains pays limitrophes s'y intéressent. C'est le cas du Portugal où la règlementation devrait se durcir". Des clients qui ont permis à l'entreprise de réaliser un chiffre d'affaire d'environ 100 000 euros en 2018, sur dix mois d'activité. "L'objectif serait d'atteindre 500 000 euros en 2019".

Un potentiel à exploiter

Pour y parvenir, plusieurs axes sont envisagés. Le développement d'un réseau de distributeurs d'abord. Réseau qui en est à ses prémices pour le moment. Daniel Garcia mise aussi beaucoup sur les salons et les prix qu'il peut y recevoir, gage d'une plus grande notoriété. Sans négliger le bouche à oreille et la prescription par des acteurs tels que des Chambres de l'agriculture. Pour répondre à la demande, il faudra aussi recruter "des mécaniciens moteurs, une force commerciale, des personnes pour faire tourner le laboratoire de R&D qu'on est en train de monter".

Car la recherche et développement fait pleinement partie de la stratégie pour s'imposer comme un expert, se positionner comme une société de conseil dans la dépollution des effluents organiques, quitte à réorienter vers d'autres entreprises si nécessaire. Elle devrait aussi donner des clés pour dépolluer à plus grande échelle.

A terme, l'enjeu serait de traiter d'autres types d'effluents, dans d'autres domaines. Car pour Daniel Garcia, la dégradation n'est qu'une des facettes du potentiel des bactéries photosynthétiques. "Elles ont d'autres cordes à leur arc. Elles peuvent permettre la production de pigments, utilisables, pourquoi pas, dans les cosmétiques ou dans l'alimentation animale. Elles ont aussi un potentiel enzymatique très important qui pourrait donner lieu à des applications particulières. L'avenir de la société est d'exploiter tout ce potentiel". Et de devenir une "référence" en la matière.

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